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M'écrire

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1 mars 2007 4 01 /03 /mars /2007 23:00









 

 



Après mon coup de cœur pour « Le café de l’Excelsior », je poursuis ma découverte de l’écriture de Philippe Claudel avec son dernier recueil de nouvelles « Le monde sans les enfants et autres histoires ». Le recueil est composé de vingt histoires destinées aux enfants et à ceux qui n’ont pas perdu « leurs lunettes bleues, lunettes roses ». Ce qui n'est peut être pas mon cas car j’avoue ne pas avoir été complètement séduite malgré une –toujours- très belle écriture et des thèmes louables : L’horreur de la guerre au quotidien (« Le petit voisin »), la télé qui rend con (« La vie de famille »), les enfants des bidonvilles (« Jaime »), le vaccin du bonheur  («  Le vaccin de Zazie »)…

 

Il y a toutefois de belles perles qui vous font venir le sourire jusque là …

 

Le dur métier de fée

Coraline peigne sa poupée dans sa chambre quand une petite fée apparaît devant elle. Loin d’être surprise ou heureuse (Normal quoi ! vous feriez quoi,  vous,  si une fée se plantait devant vous ?) la fillette l’accueille avec ennui et indifférence. Comme cette histoire suit une nouvelle qui met en scène des enfants blasés par les histoires de leur grand-père (« Les histoires »), on se dit bof c’est reparti…Que nenni !!! C’est bien une histoire de notre siècle mais pas celle que l’on croit ! Et on sourit du tour que nous joue l’auteur, à croire qu’il a fait exprès de faire suivre ces deux nouvelles…

 
Le chasseur de cauchemars

 
Raymond et José seront bientôt à la retraite et se lamentent sur la disparition prochaine de leurs beaux métiers artisanaux mis à mal par les technologies modernes et la loi du marché. Rien d’exceptionnel me direz-vous sauf que…Raymond et José n’ont pas vraiment …euh …des métiers ordinaires et …de tout repos : l’un traque, l’autre dresse les…cauchemars.

 

Dégougouillez-moi bien !

 
Quand Philippe Claudel réinvente Queneau…

 

Le gros Marcel

 
Mon petit préféré !

Dans sa jeunesse, Marcel était svelte et faisait de l’œil à Joséphine…Joséphine, le tutu de Marinette…Car Marcel est un cahier, un beau cahier à la couverture rouge plastifié…

 

Au premier trimestre, ils filent le parfait amour tous les lundis dans le cartable de Marinette…Mais au fil des mois, le beau Marcel se gorge de photocopies et d’exposés en tout genre…et devient …le gros Marcel.

 

Succès garanti si cette histoire est un jour illustrée pour les enfants…

 

Eclats de lecture :

Il toucha le fond. D’autant qu’il continuait toujours à grossir, grossir, grossir, car en plus des photocopies dont le rythme de distribution ne faiblissait pas, la nouvelle maîtresse avait convaincu les enfants de faire un herbier, et c’est bien sûr Marcel qui avait hérité d’un brin de muguet, de deux marguerites, cinq violettes, un pissenlit, un chardon – non mais vous vous rendez compte, un chardon ! – et d’une tulipe, heureusement naine.

 
Voir aussi chez : Florinette

 

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31 janvier 2007 3 31 /01 /janvier /2007 21:50


 







Sur l’autre rive de ce petit livre, j’ai fermé les yeux. Sous mes paupières mi-closes, tandis que vacillaient les vestiges d’une lumière blanche, j’ai vu peu à peu apparaître un dessin à l’estompe en demi-teintes violines.

 

L’image d’un petit café de la fin des années 60, antre étroit, manière de boyau tortueux, s’est imprimé sur ma rétine, quelques mauvaises chaises et quatre tables de pin rongées par les coups d’éponge, un comptoir en fin de course qui grâce à sa carapace de zinc, revêtait des allures de lutteur casqué…

 

Debout derrière son comptoir, un vieil homme sort du brouillard : mains rugueuses aux ongles endeuillés de charbon, masse écrasante de sa stature de chêne gaulois et bons sourires, plissés du front au menton. Un vieil homme pauvre de trop boire,…qui  aimait son métier qu’il pratiquait comme un art , et qui faisait chaque jour ses gammes dès le petit déjeuner, en trempant ses tartines dans un bol de muscadet. Un vieil homme dont le cœur déborde de poésie,  gardien du phare, où échouent chaque jour des astres mélancoliques qui avaient passés soixante-dix ans et plus, des dieux à mobylettesqui avaient de leur vie épuisé les surprises, et qui se retrouvaient au vieux bistro et rompaient dans les blancs gommés et les rosés picons l’éternité des jours moroses.

 

Auprès du vieil homme aux traits confus, un enfant de huit ans observe le spectacle des vies simples, les rituels de ces hommes qui se fréquentaient depuis l’enfance et qui n’avaient plus guère besoin des mots pour se parler ;  

 

Les costumes étriqués du dimanche qui donnent au geste une majesté guindéequi finissaient par déteindre sur les conversations, un semblant plus sérieuse ; Les braconnages naïfs qui s’échangent à l’Excelsior ;

 
La  rue, les rumeurs du monde et ses agitations … qui se rompent sur cette enclave oubliée à la façon des hautes vagues sur l’étrave d’un navire : le passage du laitier, du porteur de journaux,  les ouvriers en bande, les contremaîtres un peu raides et les ingénieurs, plus raides encore, surnommés par le Grand-père les constipés de l’âme ;  

 
La ville, la Grande- Ville où il faut se rendre parfois.

 

Auprès du vieil homme aux traits confus, un orphelin, un enfant de huit ans qui n’est plus, esquisse dans une prose nette  (LMDA) le souvenir de cette enfance-là et de son grand père, surtout,  avec lequel il va vivre pendant trois ans, avant d’en être à jamais séparé par un Homme de la Grande Ville.

 
Un grand père avare de baisers mais qui lui réécrit le monde pour lui plaire et le consoler, un grand père protecteur qui veille sur sa jeune vie pour éloigner d’elle tous les assauts du mal, un grand père qui l’entoure d’un grand pan de douceur, de l’essentiel et des petits riens…

 


Un livre, un tout petit livre, à lire à l’heure de la sieste, puis s’assoupir doucement pour en étirer le souvenir.

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